Histoire de l’anesthésie en Belgique

Retour
    FR
    Titre

    Histoire de l’anesthésie en Belgique

    Résumé

    De tous temps, l’humanité a cherché à combattre la douleur par l’absorption d’extraits de plantes telles que le pavot, la jusquiame, la stramoine, la mandragore et d’alcool. Ces drogues étaient administrées en cataplasmes, potions, clystères. Les éponges somnifères, appliquées sur le visage étaient connues depuis l’Antiquité et ont été utilisées dans certains pays jusqu’au 13ème siècle. Mais jusqu’au milieu du 19ème siècle, chirurgie et douleur étaient indissociables. Les indications de la chirurgie étaient réduites, même si certains patients pouvaient bénéficier de ce type de préparations calmantes. L’éther et le protoxyde d’azote (gaz hilarant), connus depuis le 18ème siècle, n’ont été reconnus comme anesthésiques qu’au milieu du 19ème siècle. C’est Morton (Boston) qui réalisa la première anesthésie à l’éther en octobre 1846. La nouvelle parvint rapidement en Angleterre. Sur le continent, ce sont deux chirurgiens belges qui, début 1847, pratiquèrent les premières anesthésies à l’éther. Puis vint le chloroforme. Ces deux anesthésiques étaient administrés à la compresse ou au masque par le médecin traitant, un étudiant ou une infirmière. Contrairement à l’Angleterre, l’analgésie obstétricale, dite " narcose à la reine ", par allusion à Victoria qui en bénéficia, eut peu de succès en Belgique. Dans les années 1880, la cocaïne puis la novocaïne permirent l’anesthésie locale, puis les blocs locaux et la rachianesthésie, pratiqués par les chirurgiens avant d’opérer. La chirurgie fit alors un véritable bond en avant, y compris dans notre pays. Pendant la guerre 14-18, ces progrès ont permis de sauver de nombreuses vies humaines. Quand l’anesthésie générale était nécessaire, elle était administrée par un autre médecin ou une infirmière. L’entre-deux-guerres ne vit pas de progrès significatifs en anesthésie, sauf l’anesthésie intraveineuse aux barbituriques apparue fin des années 30. Les complications per- et postopératoires étaient courantes. A part les sulfamidés, les antibiotiques n’existaient pas. Pendant la guerre 40-45, il n’y aura en Belgique aucun progrès en chirurgie et anesthésie. Mais après la Libération, des médecins belges formés spécifiquement en anesthésie dans l’armée anglaise, ou dans d’autres pays non occupés, vont former le noyau d’un nouvelle spécialité, l’anesthésiologie-réanimation, qui devra se battre pour être reconnue comme spécialité à part entière en Belgique. Elle bénéficiera des progrès techniques et scientifiques effectués dans tous le domaines de la médecine, et y a contribué largement. La surveillance et la réanimation des opérés, pendant et après l’intervention, qui étaient à l’origine basées sur les signes cliniques, vont bénéficier des progrès en appareillage et monitoring, permettant les interventions chirurgicales les plus audacieuses, dans tous les domaines. Des salles de réveil et de soins intensifs apparaîtront peu avant les années 60. Actuellement, on retrouve des anesthésistes oeuvrant dans tous les secteurs hospitaliers, organisant aussi les cliniques de jour et les cliniques de la douleur. Dans notre pays, la qualité de la formation clinique et scientifique des anesthésistes est largement reconnue, ainsi que la recherche dans ces deux domaines. Rev Med Brux 2012 ; 33 : 179-87

    Title

    History of anaesthesia in Belgium

    Abstract

    Man has for a long time searched means of fighting pain, by administration of plant extracts such as poppy seed, jimson weed, henbane, mandrake and alcohol. These substances were given in the form of cataplasms, potions or clysters. Somniferous sponges, applied on the face, were known since Antiquity and have been in use in some countries up to the 13th century. Surgery and pain were inseparable till mid 19th century. Indications for surgery were few, even though some patients could benefit from these sedative drugs. The anesthetic properties of ether and nitrous oxide (laughing gas), known since the 18th century, were only recognized in the 19th century. William Morton, a dentist, was the first to successfully provide general anesthesia with ether in 1846 in Boston. News spread to England shortly afterwards. On the European continent, the first use of ether was due to 2 Belgian surgeons. Next came chloroform as novel anesthetic. They were administered via either a gauze or a mask by the general practitioner, a medical student or a nurse. Unlike England, the use of these drugs for obstetrical anesthesia (called anesthesia " à la reine ", alluding to Queen Victoria who benefited from chloroform during childbirth) was never very popular in Belgium. Since the years 1880, the use of cocaine, then of novocaine allowed to perform local anesthesia, then local nerve blocks and spinal anesthesia, installed by the surgeon prior to operating. Since then, surgery experienced rapid progress, Belgium included. During the 1914-1918 first World War, these advances saved many human lives. When general anesthesia was necessary, it was cared for by another physician or a nurse. The interwar period did not see significant advances in anesthesia, except in intravenous anesthesia with barbiturates, appeared in the late 1930’s. Intra- and postoperative complications were frequent. Apart from sulfonamides, antibiotics were non-existent. During the war 1940-45, there was no progress in anesthesia and surgery in Belgium. After the Liberation, Belgian doctors specifically trained in anesthesia by the British army, or elsewhere in non-occupied countries, will form the core of a new specialty, " anesthesiology-reanimation ", who will fight to be recognized as a specialty in itself in Belgium. It will beneficiate from - and largely contribute to - the technical and scientific advances in the medical field. Initially based on clinical symptoms, monitoring and care of operated patients, during and after operation, will beneficiate from modern monitoring and other technical apparatus, which will allow the most audacious surgical technical performances in all domains. Postoperative and intensive care units will appear in the years 1960’s. Nowadays, anesthesiologists work in all hospital settings, and also organize One-day clinics and Pain clinics. In Belgium, the quality of the clinical and scientific training of anesthesiologists is widely acknowledged, as well as clinical and experimental research. Rev Med Brux 2012 ; 33 : 179-87

    Chapitre
    HISTOIRE DE LA MEDECINE
    Type d'article
    Histoire de la médecine
    Mots clés
    medicine
    history
    anesthesia
    Belgium
    Auteur(s)
    M. De Rood
    Télécharger l'article